ChoonHee Ueda et c'est tout parce que je suis une bouse pour les titres.

Je ne sais pas trop où je suis, je crois que je me suis encore perdue. Ça m'arrive souvent en ce moment, mais je ne sais pas pourquoi... Actuellement je crois être dans une ville, Tokyo ? Séoul ? Aucune idée. C'est une ville en tout cas. Je marche quelque peu inquiète quand je me rends compte qu'une tentacule monte le long de ma jambe. Quelle horreur ! C'est répugnant ! Et elle reste collée quoi que je fasse en plus !! C'en est trop, je n'arrive pas à l'enlever et rajouté au dégout mes nerfs lâchent, me voilà en train de crier... En sueur, dans mon lit... C'était un rêve ! Je regarde l'heure pour me calmer, 02h00 du matin, 15 octobre. Super journée de 21 ans qui commence. Mais elle continuera plus tard, pour l'instant je vais terminer ma nuit.

Après quelques minutes à faire la crêpe, je dois me rendre à l'évidence, la journée commencera à 02h20 du matin. Pour passer le temps car mon rendez-vous n'est qu'à 11h, je range mon bureau. En fouillant pour trouver un document administratif, je tombe sur mon journal intime. Je ne l'ai pas feuilleté depuis... bien 2 ans.

La première page remonte à une petite vingtaine d'année, il y a 18 ans exactement, ma mère résumait mes journées pour moi. Il y est écrit en coréen, que ma première journée d'école c'est bien passée, que je me suis fait une amie, mais que j'étais beaucoup restée dans mon coin, en plus d'autres détails. Entant que professeur de ma classe jusqu'à ce que je quitte l'école primaire, elle a pu y inscrire bien des détails. Chaque page relate une semaine d'école ainsi que le week-end avec une photo pour illustrer, et à la fin de chacune la même chose est dite : "tu as des amis ChoonHee mais tu es seule". Il semblerait qu'elle l'est fait exprès et qu'elle s'attendait à ce que je relise ce journal étant plus grande. Quelle drôle d'idée que d'écrire le journal intime de sa fille maman, comment osais-tu me reprocher de ne pas avoir la même logique que les mathématiciens après ça ? Comment aurais-je pu me rapprocher des autres lorsque la faim et la tentation perpétuelle m'entourait ?

L'écriture a maintenant changé, plus tremblante et rude. Je reconnais là mes premières lettres. C'est amusant. Me voilà maintenant à 21 ans, assise dans mon lit à me remémorer mes souvenirs d'école. Je relate ici l'épisode du bol de riz, je me souviens même des paroles de cette fille, que nous nommerons BooJa, nous avons tous eu une BooJa dans notre vie, une fille qu'il est impossible d'aimer, tout le monde l'aime sauf toi. Je la détestais. "Et bien, tu as peur que ça ne passe pas ? Tu refuses de manger le riz ? Squelette va !" Paroles complètement stupides quand j'y repense car à revoir la photo je n'étais pas si squelettique, j'étais dans la norme, de ce que je me souviens elle devait faire le quadruple de ma taille, tant en hauteur qu'en largeur, ça devait être de la jalousie... Ça me rend triste quand j'y repense, elle devait en souffrir. Mais je refuse de culpabiliser. Ce n'est pas moi qui l'ai harcelé pendant 3 ans.

L'épisode du divorce. Je relate ici que la Corée me manquait. J'avais 10 ans à cette époque. Un an déjà que mes parents s'étaient séparés et que j'ai dû suivre mon père au Japon. J'ai à ce moment découvert une toute autre façon de vivre entant que jeune goule. Ma mère était constamment aux petits soins, de façon à ce que mon existence ne sois pas trop pénible pour moi-même, elle se débrouillait pour nous fournir mon frère, ma sœur et moi en nourriture, nous ne nous posions pas la question de savoir comment elle faisait, mais à bien y réfléchir je pense qu'elle allait dans les morgues, c'est ce que nous avons parfois fait avec mon père. Nous devions rester avec elle les midis d'école.
Mardi 17 mars, ce jours là j'ai appris les circonstances de la rencontre de mes parents. Loin d'être romantique, mon père, fiché S à aidé ma mère rang C à se nourrir pendant un temps. Il tuait pour elle, tandis qu'elle lui offrait un toit où dormir. Il venait d'arriver en Corée pour son travail, journaliste. Je suppose que ces services rendus ont contribué, voir ont été la raison de leur amour. Une sorte de mensonge réciproque, car les deux étaient très seuls et ressentaient une peur presque maladive à l'idée que ça s'éternise.

Ce que j'ai toujours trouvé étrange c'est que ma mère avait une peur quasiment phobique des humains, mais qu'elle aidait à les éduquer... Tandis que mon père était bien plus sauvage. Au contraire de ma sœur, je suis toujours restée auprès de ma mère, je trouvais mon père agressif, elle m'a donc transmit la plupart de ses peurs, entre celles que j'ai développé seule. Mais bizarrement, j'ai dû partir avec mon père, je n'ai jamais su pourquoi, mais ça a assurément était la plus grande déchirure de ma vie.

Après avoir passé plusieurs pages, je reconnais mon écriture japonaise que je mélangeais au coréen de peur qu'un espion vienne fouiller dans mon journal, quelle drôle de lubie j'ai eu... Le japonais était moins assuré que le coréen, mais sans vouloir me vanter, ma calligraphique n'était pas mauvaise pour une adolescente de 13 ans ne pratiquant que depuis 2 ans.
Je retrouve le jour où mon amie m'avait invitée à sa pyjama party pour son anniversaire. Dans mon école un jeu était très populaire. Le jeu de la goule. Il y avait une ou deux goule selon le nombre de participants, le reste faisait partie de la CCG ou étaient des mercenaires, la ou les goule(s) ne devai(enen)t pas se faire prendre. Lorsque j'ai pioché le petit bout de papier, j'ai eu le malheur d'y voir inscrit "goule". En soit je n'avais pas peur de me faire démasquer, ce n'était qu'un jeu et j'avais l'habitude. Mais ce qui me fit comprendre les craintes de ma mère fut ce qui se passa lors de l'enquête. "Nous l'aurons ce sale monstre !" "Ouais, allons tuer la goule !" "Elle ne mérite pas de vivre !". La simulation de ma mort entant que goule fictive fut d'autant plus traumatisante par la violence de l'exécution. J'ai cru me faire tuer par mes propres amis... Amis dont je me suis largement éloignée les semaines qui suivirent.

Dans un élan de sentiments je tourne violemment la page. Il y a un trou d'un an. C'est l'année où j'ai commencé à fréquenter Fujio. Ce fut une belle année. Puis nous avons changé de quartier avec mon père et mon frère, nous étions proches du 3e arrondissement. Trop dangereux aux yeux de mon père. J'ai donc continué de grandir dans le 23e.
C'est d'ailleurs le jour de l'emménagement que reprennent mes récits. Rien de bien transcendant. Jusqu'à ce qu'on arrive à une page ondulée. Certainement due à des larmes. Je n'ai pas pour habitude de pleurer bien que je sois sensible. Mais rien que le fait de repenser à cette soirée me met mal à l'aise.

Quelques années après notre emménagement, mon père était parti en voyage pour son travail, il nous avait acheté des masques au cas où et nous avait demandé à ChulHei et à moi de les conserver constamment avec nous. Une semaine déjà que son voyage s'attardait, il ne revenait pas et nous manquions de café, les morgues n'étaient pas accessibles, les cimetières bien trop sacrés. Je rentrais de l'école, la faim au ventre. J'avais 17 ans. Mon frère en avait donc 15. Il était jeune, impulsif et ne savait pas ce qu'il faisait, je ne cherche pas à l'excuser, car ce qu'il a fait et ce qu'il m'a fait faire n'est pardonnable sous aucun angle, mais je comprends malheureusement ce qui à pu le motiver. Sur le chemin de la maison, une odeur merveilleuse, bien plus que celle du café se promenait dans les airs d'une allée sombre, étroite, parfaite pour un film d'horreur. Lorsque je m'y suis aventurée par curiosité, j'ai eu l'épouvante de voir mon frère agenouillé au sol près d'un corps féminin tremblant. Il dévorait son bras. La femme pas plus vielle qu'une étudiante universitaire était encore vivante, nos regards se sont croisés. D'un geste j'ai écarté mon frère pitoyable, et après avoir observé la jeune femme un instant, son regard me suppliât. Regroupant tout mon courage, je lui brisais la nuque. Puis croqua un instant, les larmes aux yeux au creux de son coup encore chaud. Finalement nous avons laissé son corps gisant au sol, pathétique.

Nous n'avons jamais reparlé de cet incident. Mon père n'en a jamais rien su, il est d'ailleurs revenue le lendemain matin.

De ce que je peux lire maintenant, rien d'autre ne s'est passé. Je revois la photo prise lors de ma remise de diplôme, ma mère était venue à la réception accompagnée de ma sœur qui m'enviait, elle qui rentrée tout juste au lycée.
Je revois quelques pages plus tard la photo de mon amie Orie et moi lors de notre premier jour à l'université. Elle a été la seule amie humaine que je me suis fait lors de ma dernière année de lycée.
Lors de ma deuxième année à l'université en section littéraire, j'ai trouvé un travail dans un petit restaurant et pris un petit appartement seule. De ce fait, j'ai dû affronter ma peur de l'inconnue et surtout des humains inconnus, pour finalement me rendre compte que l'expérience que j'ai pu avoir n'était que la conséquence de la bêtise adolescente.

Désormais, l'heure est venue d'aller changer mon masque trop impersonnel. Par mesure de précautions je me sens plus à l'aise avec au quotidien, caché dans mon sac.